Un enfant roumain est décédé au cours d’une sortie scolaire. Une société privé titulaire d’une licence de chaîne de télévision a interviewé ses camarades de classe dont une enfant de 11 ans. Elle a été floutée mais sa voix non transformée. Cette dernière n’avait pas assisté à l’accident et aucun consentement, des parents ou des enseignants, n’avait été recherché. Elle avait déclaré que les enseignants n’avaient pas été suffisamment attentifs et présents, ce qui a engendré une attitude hostile à son encontre. Sa mère a demandé réparation du préjudice moral subi.
Les juges roumains rejettent cette demande en faisant prôner la liberté d’expression sur le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant et son droit à la protection de son image et de sa vie privée. Pour les juges nationaux, l’interview était un débat d’intérêt public. L’attitude hostile des enseignants et des camarades n’était pas la conséquence du comportement de la société.
La Cour européenne des droits de l’Homme condamne la Roumanie pour violation de l’article 8 de la Convention européenne en raison de cette posture judiciaire. Elle rappelle que les Etats parties à la Convention ont l’obligation positive de tenir compte de la particulière vulnérabilité des mineurs. Concernant la mise en balance du droit à la vie privée et de la liberté d’expression, elle rappelle que seules des “raisons fortes” peuvent la conduire à substituer son point de vue à celui des juridictions internes. Les juridictions roumaines n’ont assuré cette balance que de manière superficielle et elles n’ont pas réalisé un juste équilibre des intérêts.
CEDH, 1er mars 2022, n°35582/15 - I.V.T. c/ Roumanie