Parenté transgenre : Equilibre entre sexe à l’état civil et sexe biologique.

CEDH, 4e sect., 4 avril 2023 n°5368/18 et 54741/18, O.H et G. H. C/ Allemagne et CEDH 4e sect., 4 avril 2023, n7246/20, A H et autre c/ Allemagne.

En l’espèce :  Dans une première affaire, un homme transgenre donne naissance, grâce à un don de sperme, à un enfant en 2013, deux ans après avoir obtenu son changement de sexe à l’état civil. Il souhaite être désigné comme père dans les registres de naissance, conformément à son nouveau sexe juridique, le second lien de filiation n’étant pas établi. Dans la seconde affaire, un couple de femmes, dont l’une est transgenre, donne naissance à un enfant en 2015, la femme cisgenre ayant accouché d’un enfant conçu à l’aide des gamètes « mâles » de la femme transgenre. À la naissance de l’enfant, la femme ayant accouché est désignée comme mère dans les registres de l’état civil. En revanche, les autorités allemandes refusent de désigner la femme transgenre également comme mère, en dépit d’une reconnaissance de maternité effectuée devant notaire avant la naissance.

Procédure : Le 6 septembre 2017, Cour fédérale de justice allemande se prononce dans la première affaire et rejette le recours formé par l’homme transgenre. Selon elle, la mère est, au sens du droit allemand, celle qui accouche d’un enfant. Le droit allemand en matière de filiation reposerait ainsi sur l’établissement d’un lien entre les fonctions procréatrices des parents et leur sexe, assignant le rôle de la personne qui accouche à une femme (la mère) et le rôle de la personne qui féconde à un homme (le père). Il résulterait du droit allemand que tout enfant, y compris né de personnes transgenres, doit être rattaché à une mère et à un père, ce qu’avait, par ailleurs, jugé la Cour constitutionnelle allemande, le 11 janvier 2011, anticipant les effets de sa décision. La Haute juridiction allemande considère que l’homme transgenre ayant donné naissance à son enfant doit alors être désigné comme mère dans les registres des naissances à partir de ses anciens prénoms féminins, le tout nonobstant ses changements de sexe et prénoms à l’état civil.

Quelques mois plus tard, le 29 novembre 2017, forte de sa précédente solution, la Cour fédérale de justice allemande rejette de la même manière le recours formé devant elle dans la seconde affaire. Puisque le droit allemand ne permet l’établissement que d’une seule filiation maternelle (en l’absence de reconnaissance de la co-maternité) et que la mère est celle qui accouche, la femme transgenre génitrice est désignée, dans les registres de naissance, comme père et doit l’être sous ses anciens prénoms masculins.

Solution : Saisie de ces affaires, la CEDH a décidé de rendre deux décisions datées du même jour et conclu à chaque fois, à l’unanimité de ses membres, qu’il n’y a pas violation de l’article 8 de la Convention EDH, sur lequel était fondé le seul grief jugé recevable.